Gilles Marchand

Le point sur la convergence RTS

Nouvelle entreprise, nouvelle plateforme internet, nouveau logo. Les conséquences du projet de convergence des médias en Suisse romande commencent à se rendre visibles avec le développement de la RTS. Mais les inquiétudes sont toujours présentes, notamment au moment où la SSR annonce de mauvais résultats financiers. Gilles marchand, directeur de la nouvelle entreprise a accepté de répondre à nos questions.

C’est fait ! Cette fois, la nouvelle RTS est officiellement lancée. Témoin de cette mise en marche, le nouveau logo de l’entreprise présenté pour la première fois lors d’un évènement public lors du salon du livre de Genève. La plateforme internet RTS.ch prend elle aussi de l’ampleur et étoffe son contenu, même si elle est encore loin de détrôner ceux de ses chaines TSR et RSR.

Mais le contexte est aussi assombri par les mauvais résultats financiers de la SSR. Lors de la conférence de presse du 27 avril dernier à Berne le président Armin Walpen, a annoncé un déficit de près de 45 mios de CHF pour l’année 2009. Si rien ne semble décidé, il est clair que l’offre de programmes est potentiellement menacée. Armin Walpen, interrogé dans le Journal du matin de la Première le 28 avril dernier affirmait ainsi « pour faire des économies supplémentaires, je pense qu’il faudra bien couper dans notre offre ». En Suisse romande, c’est la chaine de radio Option Musique qui est particulièrement désignée.

Tout d’abord, en tant que directeur, quel bilan tirez-vous à chaud du démarrage de la nouvelle entreprise RTS ?

Je m’attendais à des difficultés et je ne suis pas déçu… Pour l’instant, ce projet d’entreprise est encore un peu technique et la dimension éditoriale virtuelle. Les collaborateurs n’y voient encore que des contraintes supplémentaires et des changements de structures. Surtout à la radio où le modèle d’organisation par domaine d’activité et de programme fait craindre la disparition des identités spécifiques des chaînes. Il faudra du temps et l’épreuve des faits pour démontrer que les chaînes radio ne seront pas affaiblies. Je parie même le contraire. L’expérience montre que lorsque les entreprises audiovisuelles se sont intégrées (radio / tv / web), c’est en règle générale la radio qui a bénéficié de ce mouvement. Cela dit, notre intention n’est pas de favoriser un média par rapport à un autre, mais de développer le tout.

Nous avons trois buts clairs :
  • nos programmes de radio et télévision doivent gagner en impact dans un marché saturé,
  • nous allons gagner aussi en efficience, en efficacité, réduire nos coûts d’infrastructure,
  • enfin j’espère que nous pourrons gagner en intelligence et paradoxalement en diversité grâce à la coopération entre nos émissions.

Trop simple ! Trop cher ! Le nouveau logo d’entreprise n’a pas provoqué que des réactions positives. Votre avis ?

Pour dire les choses comme elles sont, il n’a provoqué à l’interne que des réactions négatives ou dans le meilleur des cas une indifférence polie. Je comprends cela. Le public ne s’est pas encore prononcé, ce qui est normal puisque ce visuel ne concerne pas encore les chaînes radio et tv. Ce nouveau logo a été conçu pour exprimer la cohérence du groupe SSR SRG et non la spécificité de chacune de ses entité.

Cela dit, nous allons nous y habituer, d’autant plus qu’à défaut d’être très créatif, ce logo à le mérite de l’efficacité. Surtout dans le monde numérique. Et puis en matière de design, la sobriété est souvent ce qu’il y a de mieux. Rappelez-vous ce qui a été écrit lorsque les avions de Swiss ont dévoilé leur nouvel habillage….Quant au prix, je tiens à souligner que tout le développement de cette nouvelle identité n’a rien coûté à la RTS. Nous ne prendrons en charge que les frais de déclinaison, que nous aurions dû de toute façon assumer, quelque soit le logo retenu. De ce point de vue, nous avons donc pu bénéficier de conditions particulièrement avantageuses.

Il est précisé que ce nouveau logo a été développé dans un souci de cohérence avec les autres marques du groupe SRG-SSR. Concrètement, pourquoi un tel besoin d’harmonisation ?

Parce que c’est la SSR qui est dépositaire de la concession de service public, et que la SSR a besoin de montrer concrètement qu’elle est organisée de manière cohérente et efficiente. Cela correspond d’ailleurs aux nouveaux statuts de la SSR (une seule entreprise, un seul CA).

La plupart des services publics fonctionnent ainsi. Le meilleur exemple en la matière est la BBC.

La SSR a récemment annoncé un bilan financier déficitaire avec plus de 45 mio de pertes pour 2009. Peut-on craindre des répercussions sur le développement de la RTS ?

Il est évident que si nous ne pouvons améliorer nos recettes, nous devrons diminuer encore nos charges, dans toutes les régions. On ne peut pas laisser filer le déficit et donc l’endettement sans réagir. C’est une question de responsabilité, aussi bien pour le public que pour nos collaborateurs.

Est-ce que l’offre de programmes risque d’être touchée par d’éventuelles mesures d’économies comme le laissait entendre M. Walpen sur les ondes de la Première le 28 avril dernier ?

Je ne l’espère pas et nous ferons tout ce qui est possible pour l’éviter. Mais il faut se rappeler que nous ne sommes pas seuls juges des impacts sur les programmes : toutes nos chaînes sont concessionnées et seul le Conseil Fédéral, autorité qui accorde les concessions, peut nous autoriser à les supprimer. Nous sommes bien sûr libres d’agir à l’intérieur des programmes de radio et télévision.

On parle beaucoup de l’aspect financier et politique de la convergence des médias. Mais le projet a aussi pour but de permettre le développement des nouvelles technologies de compétences « multi-médias » pour les journalistes. Où en est-on actuellement ?

Nous mettons les choses en place, nous créons les conditions pour que ce développement soit possible. Nous créerons par exemple une grande plateforme d’information en continue commune. Les journalistes pourront, progressivement, sur une base de volontariat et après formation, passer d’un média à l’autre. Je suis absolument convaincu que dans 5 ans, les craintes et tensions actuelles, à ce sujet, seront apaisées et qu’il sera formidable pour tout le monde de pouvoir compter sur cette mobilité professionnelle. Pour les rédacteurs en chef comme pour les collaborateurs qui disposeront alors de perspectives professionnelles extraordinaires dans un si petit territoire.

Enfin, pouvez-vous nous dire quelques mots sur les prochains évènements qui attendent les auditeurs/téléspectateurs de la RTS ?

D’abord une première expérience d’opération complètement intégrée, le 26 mai, à propos de l’innovation scientifique en suisse romande. Puis une grande opération à propos de la coupe du monde foot, avec une collaboration entre TSR2 et Couleur 3. Il y aura aussi Label Suisse, qui offrira une couverture radio et tv inédite de cette grande manifestation publique en faveur de la musique suisse. Et vous verrez se développer, progressivement, de nombreuses collaborations originales entre des émissions de radio, de télévision et des déclinaisons web. Je suis convaincu que le public romand y trouvera largement son compte.

Gilles Marchand

Interview avec Gilles Marchand dans Médiatic, journal des SRT, juin 2010

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