Gilles Marchand

FTE-RTS, 20 ans sur tous les écrans

A l’origine, en 1994, il s’agissait de montrer, sur grand écran, que les films produits pour la télévision pouvaient avoir des exigences de qualité élevées et comparables, dans un registre différent, à celles du cinéma. Bref, qu’il y avait un espace de création intéressant à investir à la télévision, des écritures à inventer et un grand public à rencontrer.

Cela ne fait pas si longtemps, 20 ans exactement; l’âge du Festival Tous Ecrans (FTE). Mais, il y a 20 ans, les débats étaient durs entre les écrans. Et il faut saluer l’intuition du fondateur de ce festival qui s’appelait alors « Cinéma Tout Ecran », Léo Kaneman : l’intuition forte que le film est au centre du processus de création, qu’importe le vecteur.

 

20 ans après, nous observons un double bang

Entre le petit et le grand écran, d’abord, les relations ont bien changé; des séries tv sont produites, au même titre que des longs-métrages. On remarque des immenses réalisateurs de cinéma investir la télévision, et les séries sont arrivées du monde entier, avec des moyens parfois considérables et des succès planétaires.

A une autre échelle, la RTS s’est aussi lancée dans cette aventure, depuis quelques années, avec « T’es pas la Seule », « 10 », « CROM », « L’Heure du Secret », « Port d’attache », ou encore « A Livre Ouvert ». Et, en février 2015, une nouvelle série, « Station Horizon », produite par Jump Cut Production.

Tout cela pour souligner que les luttes farouches et les postures des années 70 et 80 semblent bien lointaines.

Deuxième choc, les écrans se fragmentent, se multiplient et se déplacent. Ils sont grands ou  minuscules, fixes ou mobiles, rigides ou souples. Ils permettent une nouvelle relation aux films, exigent une nouvelle écriture, une nouvelle approche, et ils offrent de nouvelles expériences au public. Et tant mieux, parce que cela ouvre de nouvelles perspectives au talent, au récit et à l’imagination.

Ce deuxième choc, la direction actuelle du festival, conduite par Emmanuel Cuénod, l’a parfaitement compris. C’est la raison pour laquelle la RTS a toujours soutenu le festival contre vents et marées, y compris au plus fort de la crise d’il y a 4 ou 5 ans, lorsqu’il a perdu d’importants soutiens fédéraux.

 

La TSR sur le web dès 2001

Très vite, au début des années 90, la TSR d’alors a parié sur la coopération entre les grands et les petits écrans. Et, tout aussi vite, la RTS d’aujourd’hui mise sur l’intégration des médias, sur l’interactivité et la participation du public.

Nos premières émissions de télévision ont été mises à disposition sur internet dès 2001, à une époque où la tension était tout aussi forte, mais cette fois non plus entre petits et grands écrans, mais entre écrans connus et nouveaux écrans. Aujourd’hui, il serait tout simplement inconcevable de ne pas proposer cette ouverture, qui apparaît comme évidente à tout le monde.

 

C’est en se serrant les coudes que la Suisse francophone arrive à peser en Suisse

FTE et la RTS ont donc bon nombre de points communs, notamment cette envie permanente de défricher de nouveaux territoires audiovisuels, même lorsqu’ils ne sont pas encore tout à fait acceptés. FTE est un festival important, qui occupe une position originale et donc forte en Suisse. Il est aussi important pour la région romande, qui a toujours fait preuve d’innovation, d’audace et de qualité dans le domaine artistique.

Dans ce secteur, comme dans de nombreux autres, il faut rassembler les forces; celles de la production indépendante, de la télévision publique et des manifestations culturelles qui réunissent les professionnels et le public.

C’est en se serrant les coudes que la Suisse francophone arrive à peser en Suisse. C’est en se serrant les coudes que nous arrivons tous à maintenir une production culturelle, en français, de grande qualité. Ainsi, notre production n’a pas à rougir de ce qui se fait chez nos voisins français ou alémaniques.

Pour cela, l’engagement et la qualité de la production indépendante sont essentiels. Dans ce marché global, nous sommes tous trop petits pour nous diviser, n’en déplaise aux modèles néo-libéraux qui, en fragmentant les ressources limitées de notre petit territoire, nous entraîneraient tous, inéluctablement, vers une marginalisation provinciale très regrettable.

Bon anniversaire au Festival Tous Ecrans, souhaitons surtout qu’il reste ouvert, iconoclaste et courageux. C’est son ADN, et nous le partageons !

 

Gilles Marchand

 

 

 

 

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